25 juin 2019

SHS : Les juges et l’interprétation de la science.

Le Big Data correspond à la fois (1) à un ensemble de données massives issues d’observations ou de descriptions d'éléments ou d’ensembles d'éléments du monde, et sur lesquelles peuvent porter des techniques scientifiques permettant le traitement de ces données, (2) à l’ensemble de ces techniques et outils utilisés afin de décrire des structures sous-jacentes à ces données, et (3) à l’attitude intellectuelle qui consiste à considérer l’existence de telles structures plus ou moins cachées sous ces données comme explicatives de l’organisation du monde. Cette attitude constitue une partie récente de la science statistique, elle-même partie des mathématiques appliquées, qui a pu se développer grâce au déluge des données mises à disposition et qui peuvent être stockées grâce à des mémoires magnétiques de plus en plus puissantes, et traitées grâce aux progrès combinés des algorithmes et des moyens du calcul automatique.
L’un des principes du Big Data repose sur l’absence d’a-priori quant à la sélection des données en entrée. Filtrer consiste pour certains théoriciens à commencer à transformer les résultats et donc à manipuler les résultats potentiels des analyses ainsi biaisées : c’est-à-dire commencer à fausser la représentation du monde ! 
La France vient de prendre une décision bizarre en la matière. En effet, les principes juridiques consacrés par la Loi imposent que des décisions de justice soient rendues publiques avec les noms des juges concernés. Elles ne sont donc pas anonymisées. Mais, et c’est là le paradoxe, une nouvelle Loi (2019-222 du 23 mars 2019) vient pourtant limiter l’utilisation de données issues de cette publication des décisions de justice. En effet, leur analyse statistique à visée rétrospective ou prospective, doit être anonyme, donc filtrée. Et toutes personnes, y compris les scientifiques, mathématiciens, sociologues, psychologues, criminologues, etc., sont passibles de cinq ans de prison s’ils utilisent les données publiques qui permettraient de produire des informations (cachées) concernant tel ou tel juge !!! Or le principe du Big Data est justement qu’on ne sait pas ce que l’on va trouver. 
L’article 33 de la Loi « dispose » (comme disent ces juges) que « Les données d'identité des magistrats et des membres du greffe ne peuvent faire l'objet d'une réutilisation ayant pour objet ou pour effet d'évaluer, d'analyser, de comparer ou de prédire leurs pratiques professionnelles réelles ou supposées. ». Au delà du cas des juges franco-français, et on peut comprendre que le législateur ait souhaité les protéger, on renvoit l’obligation d’anonymisation de données publiques, publiées par un organisme public, au scientifique ... 
Cette position est inquiétante, car le législateur impose ni plus ni moins de fausser les analyses en inventant de fait une nouvelle classe de data : celle qui est interdite au scientifique, Autrement dit,   comme aux meilleurs temps de l’obscurantisme où le juriste dictait la science, on impose au scientifique de modifier les données.
Mais alors, que va alors donner la jurisprudence ? En effet, le principe constitutionnel d’égalité des citoyens (et les juges ne sont pas des citoyens supérieurs) impose donc, de fait, d’interdire toute démarche analytique prédictive portant sur des données publiques identifiées. La porte est désormais ouverte pour que l’on limite ainsi les techniques dites d’analytics pour quiconque, y compris les experts, pilotes ou médecins, voire les clients ou les malades ... 
Tout cela va grandement compliquer les choses dans nombre secteurs en interdisant que l’identité publique de toute personne soit utilisée, et cela quelle qu’en soient les fins, prédictives, de qualité, de sécurité, de sûreté, de prévention ou de santé. Comment alors utiliser le bigdata pour l’amélioration de l’expérience client ou usager, pour l’optimisation de la performance opérationnelle, pour la diversification ou l’adaptation clinique ou pédagogique, etc.
Enfin, tout cela en France, car de l’autre côté de la frontière, aux USA, en Chine ou ailleurs, les analyses pourront être faites, ce qui pose alors le problème de l’internationalisation de la science.
Bref, la boîte de Pandore est ouverte, et cela par une décision hautement scandaleuse, prise peut-être  en toute bonne foi.

24 juin 2019

DIV : Préparer la succession de direction de l'ENSC.

La succession s'organise (lien) pour préparer une rentrée sans à-coups (lien).
L'ouverture des candidatures aux fonctions de directeur de l'ENSC est officiellement ouverte par la publication de l'Arrêté du Directeur général de l'Institut Polytechnique de Bordeaux (Bordeaux INP) auquel est rattachée l'école d'ingénieurs de cognitique (voir l'arrêté : lien).
L'élection par le Conseil d'école aura lieu le 23 septembre 2019, parmi les candidats qui auront déposé leur profession de foi (avant le 30 aout, midi), pour une prise de fonction le 8 octobre 2019, pour un mandat de cinq ans, renouvelable une fois.

D'ici là, l'activité et le dynamisme de l'ENSC continuent pour accueillir les 80 jeunes élèves issus des prépas généralistes scientifiques pour le CCINP (20 élèves - ex Concours commun polytechnique) et le concours GEIDIC (10), des cycles préparatoires des INP (10) et de l'Université de Bordeaux (10), et du concours spécifique sur titre pour les élèves (30) issus des IUT (GE2I, Informatique), Licences professionnelles, Licences MASS ou Sciences cognitives et Masters des différentes universités françaises. Un exemple d'ouverture et de diversité des origines thématiques pour une interdisciplinarité au fondement même des études, de la recherche et de la valorisation en ingénierie cognitique.

La recherche se confirme autour des laboratoires et chaires d'adossement : IMS (UMR 5218) et IMB (UMR 5251), laboratoire HEAL avec Thales, chaire STC d'IBM et Carnot Cognition ; la valorisation se poursuit avec le club des entreprises de l'ENSC, en partenariat avec les pôles de compétitivité et clusters de Nouvelle Aquitaine.