04 mars 2020

IA : Quantique - Honeywell et Microsoft contre Google et contre IBM

La compétition entre les grands du monde du calcul quantique est relancée par Honeywell qui annonce aujourd'hui son ordinateur quantique qui sera disponible pour ses clients dans un délai de trois mois avec un volume quantique d'au moins 64. Honeywell déclare de plus que le volume quantique de son ordinateur sera multiple par 10 chaque année au cours des 5 prochaines années (lien).
La technologie utilisée est dite à couplage de charge quantique à ions piégés. Le système quantique est construit autour d'un piège cryogénique de surface permettant de réarranger arbitrairement les ions (atomes chargés) et d'opérer des portes parallèles tout en contenant des informations quantiques (ions piégés) grâce à des champs électroniques, qui sont manipulés et codés à l'aide d'impulsions laser. De manière simple, on peut comprendre que les ions sont alignés selon de puissants champs électro-magnétiques perpendiculaires les uns aux autres, séparés les uns des autres par un espace défini. Leurs électrons en orbite deviennent alors des adresses personnelles des QuBits et leurs orbites sont modifiés par  les vaisseaux laser, permettant ainsi de coder l'information en exploitant à la fois superposition d'état et intrication de certains ions.
L'annonce est d'autant plus intéressante que le volume quantique annoncé (64) est impressionnant. Le volume quantique est une mesure qui représente la puissance "finale" d'un ordinateur quantique en tenant compte des erreurs, de la diaphonie des appareils, de la connectivité, de l'efficacité des compilateurs et de la performance des programmes utilisables. C'est-à-dire qu'il représente la performance et l'utilité finale pour l'utilisateur. Il diffère d'un autre indice de performance, la suprématie quantique, qui permet de réaliser la solution concrète et fiable d'un problème de calcul que les super-ordinateurs classiques ne peuvent pas résoudre en un temps raisonnable (par exemple quelques minutes, voire secondes, contre des dizaines, voire centaines ou milliers d'années). Le volume quantique annoncé par Honeywell est 2 fois plus important que celui prévu par IBM dont le futur Q System One de  de 20 QuBits est annoncé pour 2020 avec un volume quantique de 16.
Pour maintenir sa performance, Honeywell investit dans des fournisseurs de logiciels quantique tels que  Cambridge Quantum ComputingZapata Computing, et  JPMorgan Chase. Des applications directement applicables pour les services financiers sont développés par JPMorgan Chase, Cambridge Quantum développe des applications pour la chimie, le pétrole et le gaz et l'industrie en général, et Zapata se concentre sur le calcul massif, le deep learning et la cybersécurité, pour concurrencer les superordinateurs.
Pour permettre à ses clients un accès facilité à ses machines, Honeywell a conclu un partenariat avec Microsoft pour valoriser l'écosystème "Azure Quantum". De manière très transparente, Honeywell porte son projet de manière commerciale, et non à visée scientifique comme le font jusqu'ici IBM et Google, pour concrètement mettre à disposition de ses clients un outil permettant d'aborder la vaque du "calcul inabordable" par le prix du temps machine nécessaire au traitement du Big Data.
On peut regretter encore une fois que les compagnies ne puissent collaborer de manière constructive dans le développement d'une informatique quantique pour tous, en préfigurant des mondes parallèles, captifs et concurrentiels entre les grands acteurs, et des utilisateurs piégés dans un système plutôt qu'un autre.

02 mars 2020

IA : Les niveaux de maturité quantique.

Kristel Michielsen est une physicienne belge travaillant en Allemagne, au « Jülich Supercomputing Center » (JSC). Spécialisée en informatique quantique, elle s’est distinguée dans les études portant sur les composants et leur physique, puis sur les algorithmes qu’ils peuvent supporter.
Elle est à l’origine de l’adaptation de l’échelle de maturité technologique de la NASA en une échelle QTRL : la « Quantum Technology Readiness Level ».
Dans cette échelle, le QTRL1 concerne une technologie qui se limite au cadre théorique de l'informatique quantique c’est-à-dire les études des propriétés de base des dispositifs d'informatique quantique. Le niveau  supérieur, QTRL2, consiste une fois les principes de base du dispositif, à étudier des algorithmes qui pourraient être théoriquement supportés par le technologie informatique quantique précédente. La physique des Q-bits et leurs propriétés exploitées par cette algorithmique correspond au QTRL3, qui implique des études en laboratoire pour valider les prédictions théoriques et justifier ou non la poursuite du processus de développement. Le QTRL4 correspond à la fabrication concrète des systèmes uni- ou multi-Q-bits et leurs opérationalisation en termes de superposition et intrication, qui sont testés l'une avec l'autre. Au QTRL5, des composants intégrés peuvent constituer un processeur quantique, sans correction d'erreur, mais permettant une mesure fiable des résultats. Les technologies de correction d'erreur permettent d’aborder le QTRL6, de manière fiable et répétée. Cela permet d’aborder la création d’un ou plusieurs prototypes multi-Q-bits au QTRL7 en permettant de résoudre des calculs quantiques élémentaires, dans un environnement d’utilisation fluide et non expérimentale.  Les versions évolutives d'un ordinateur quantique répondant aux tests, au QTRL8, permet de mettre en œuvre et d’aborder la suprématie quantique qui correspond au QTRL9.