20 avril 2015

DIV : De quelle laïcité parle-t-on ?

La revue "Sciences humaines" propose, dans un article de Régis Meyran, un inventaire de sept familles de laïcité. Il reprend une classification proposée par Jean Baubérot, sociologue et historien auteur de l'étude "Les Sept Laïcités françaises" (MSH, 2015), dont les quatre premières étaient déjà discutées dès 1905 (date de la Loi française de séparation des églises et de l'Etat).

Laïcité antireligieuse : 
Courant représenté par le député socialiste Maurice Allard. Il s'agit ni plus ni moins que d'une lutte contre l'Église «  qui est un danger politique et un danger social. ». Cette position est celle suivie par Charlie Hebdo ou, selon l'auteur, correspond à celle de Michel Onfray, auteur du Traité d’athéologie (Grasset, 2005). 

Laïcité gallicane : Courant défendu par le député radical Émile Combes. La religion est tolérée lorsqu'elle est sous contrôle de l’État. La liberté de conscience est acceptée, mais elle relève de l’intime. Elle ne doit pas empiéter sur l’espace public. Cette position est aujourd'hui défendue par le Grand  Orient de France et est soutenue par le courant républicain et par les partisans de l’interdiction du voile dans les lieux publics. Selon l'auteur, la loi de 2004 sur les signes religieux dans les écoles publiques s’inscrirait dans ce courant, et le président de la République, Jacques Chirac, avait soutenu alors cette loi tout en s’affichant contre les racines chrétiennes de l’Europe (cf. Laïcité identitaire).
Laïcité libérale et individualiste  : 

Courant majoritaire de 1905, qui a donné lieu à la Loi. L’État est indifférent aux groupements religieux et fait appel à la liberté de conscience personnelle. Cette position se retrouve aujourd’hui à La Libre Pensée, laquelle défend les signes religieux ostensibles à l’université et dans les lieux publics. 
Laïcité inclusive et accommodante : 

Courant défendu par Aristide Briand et Jean Jaurès, qui voulaient donner les églises (appartenant à l’État depuis la Révolution) aux institutions religieuses, considérées comme des intermédiaires nécessaires entre les individus et l’État. 
Ces positions se retrouvent aujourd’hui à la Ligue 
de l’enseignement. La prise en compte des caractéristiques des religions amené à proposer, par exemple, 
des repas de substitution dans les cantines scolaires. 

Laïcité concordataire d’Alsace-Moselle : 

Cette situation est héritée de l'histoire puisque, en 1905, l’Alsace-Moselle était administrée par l'Allemagne qui l'avait annexée de 1871 à 1919. La Loi de 1905 ne s'y applique pas pour cause de non rétroaction. L’ancien système « concordataire » a donc été maintenu. Certains politiques actuels souhaiteraient le voir étendu 
à l’ensemble national. 

Laïcité ouverte  : 

C'est la position défendue par les institutions religieuses, notamment catholiques. Elle défend une « utilité sociale » des religions. Cette position alimente aujourd'hui le mouvement contre le mariage pour tous. L’Église catholique et certains mouvements voudraient ainsi inclure dans 
la laïcité la « loi naturelle » de la famille.
Laïcité identitaire  : 

C'est la nouvelle position défendue lors de son quinquennat par Nicolas Sarkozy, en promouvant une « laïcité positive »). Elle est aujourd’hui défendue par la droite et l’extrême droite qui se réfèrent aux valeurs du christianisme comme « repères » de la Nation et entendent valoriser les «racines chrétiennes » de la France. Cette position entend poser des limites aux manifestations religieuses, notamment de l’islam.


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