07 octobre 2011

DIV : ABECédaire - appel à contributions

Pour faire évoluer l'ABÉCédaire, chaque lecteur est invité à rédiger et communiquer des pages de documentation et de définition des grandes notions utiles aux étudiants de l'ENSC.


Merci de votre contribution collective.

06 octobre 2011

BIO : Un laboratoire sur une puce.


La biopuce « mChip » conçue par Samuel Sia et ses collègues du département de biological engineering de l’Université de Columbia, est un véritable laboratoire d’analyses portable. Cette puce a un coût de production d'environ un dollar, et a la capacité de diagnostiquer (pour l'instant) dix maladies différentes simultanément.
Le système nécessite une goutte de sang déposée sur une carte dans laquelle est insérée la biopuce. La lecture se fait immédiatement sur un appareil électronique d’une centaine d’euros, comme un lecteur de cartes bancaires.
Le principe repose sur un dispositif qui fonctionne sur un système de nano particules d’or et d’argent couplées avec une puce électronique. En fonction de la concentration d’agents pathogènes, le film de la biopuce est plus ou moins opaque.
Testée sur une centaine de patients rwandais, l’efficacité de « mChip » est surprenante pour sa facilité et sa fiabilité (proche de 100%). Cette découverte ne manquera pas de modifier profondément le domaine de l'analyse biologique et médicale, avec une commercialisation facilitée qui peut être envisagée directement chez le médecin ou dans les pharmacies ou parapharmacies, avec un dépistage sur place.
Résumé dans Nature Medicine, n°17, pp. 1015–1019 (2011) doi:10.1038/nm.2408

DIV : Internet : toute une histoire ! (conférence)

Internet : toute une histoire !
Conférence de Serge Soudoplatoff.
Jeudi 13 octobre 2011 à 18h
A Cap Sciences
Hangar 20 des quais de Bordeaux
"De tout temps, nous avons inventé des nouveaux outils pour transmettre, partager et conserver nos connaissances et nos idées : l'écriture, l'alphabet puis le livre, l'imprimerie… et aujourd’hui Internet.
Serge Soudoplatoff vient nous parler de ce phénomène qui a si vite envahi nos vies que l’on oublie de s’interroger : quelle est l'origine d'Internet ? Comment fonctionne-t-il ? Pourquoi bouleverse-t-il tant notre quotidien et quel futur nous construit-il ?"

Entrée libre et gratuite.

BIO - IA : Cybersinges – des hybrides contre le handicap.

L'équipe de Miguel Nicolelis, du Duke University
Center for Neuroengineering de Caroline du Nord (USA) a testé pour la première fois avec succès une interface brain-computer-brain (BMBI) chez deux singes. Grace à un implant fixé dans le cerveau des singes, les animaux ont appris, sans bouger leur propre corps, à mouvoir un bras avatar et à sentir des objets (virtuels également) (voir la vidéo).
L'implant électronique a été fixé dans le cortex moteur. C'est donc exclusivement par la pensée que les singes bougent le bras virtuel, et ont appris en retour et sentir la texture des objets qu'ils touchent ainsi, à travers des signaux électriques envoyés dans leur cerveau.
L'enjeu d'une telle étude est la conception de puces permettant à terme à des patients paraplégiques de contrôler un exosquelette couvrant le corps entier, et qui pourrait ainsi mouvoir les membres paralysés via l'implant, tout en leur permettant en retour des sensations tactiles, voire kinestésiques, envoyées sous forme électrique à l'implant.
Cette étude a été publiée dans la revue Nature du 5 octobre 2011 (résumé), et relayée par le Guardian (lien).

DIV : Steve Jobs est mort.

03 octobre 2011

BIO : Chaud au cerveau, baillez un coup !

Phénomène physiologique réflexe, le bâillement est souvent associé à l'ennui ou à la fatigue. Il provoque une profonde respiration.
Chacun d'entre nous baille environ 5 à 10 fois par jour. La fréquence est accrue au réveil, après le repas méridien et le soir avant le coucher.
Une étude physiologique menée à Tucson (Arizona : le pays de Geronimo - 1829-1909 - chef apache dont le vrai nom était Go Khla Yeh : celui qui baille), laisse penser que le bâillement pourrait aussi jouer un rôle de régulateur thermique pour le cerveau.
Andrew Gallup, du Département d'Ecologie et de biologie évolutive de l'université de Princeton, et son coauteur Omar Eldakar, stagiaire postdoctoral à l'Université d'Arizona, ont publié dans le Journal "Frontiers in Evolutionary Neuroscience" des résultats obtenus chez 160 volontaires. L'étude montre que la fréquence des bâillements varie avec la saison et les individus baillent moins quand la température extérieure est égale ou supérieure à la température corporelle. Les auteurs ont quantifié les bâillements durant l'hiver (80 sujets testés à 22 degrés Celsius en moyenne) et durant l'été (80 sujets à 37 degrés en moyenne). Les résultats indiquent qu'environ 50 % des volontaires baillent plus l'hivers par contraste avec l'été quand les températures sont équivalentes ou supérieures à celles du corps humain (moins de 25 % des participants baillent). Le bâillement est également associé au temps passé à l'extérieur puisque 40 % des participants baillent dans les 5 premières minutes après leur sortie puis ce pourcentage chute à 10 % ensuite en été alors qu'il augmente en hiver.
L'interprétation des auteurs est que le bâillement est lié à l'augmentation de la température du cerveau et sert donc de régulateur thermique par échange d'air avec l'extérieur. Des températures extérieures proches de 37°C ne permettent pas au cerveau de se rafraîchir contrairement aux températures basses de l'hiver.
Cette hypothèse confirme chez l'homme les résultats d'une précédente étude qui montrait une variation de température dans le cerveau de rats avant et après un bâillement. Le refroidissement du cerveau serait alors lié à l'augmentation du flux sanguin engendré par l'étirement de la mâchoire qui favorise l'échange de chaleur à partir de l'air ambiant qui accompagne l'inhalation profonde du bâillement.
Une piste surprenante ... à faire chauffer les neurones !
Voir : Gallup, A. C. and Eldakar, O. T. (2011) Contagious yawning and climate variation. Frontiers in Evolutionary Neuroscience 3, 1-4.

IA - SHS : Le Web contextuel.

Le Web devient "user-centric", il prend aujourd'hui en compte l’utilisateur et son contexte comme une seule entité anthropotechnique. C’est en tout cas le but du "User-Context-Module" (Module Utilisateur contextuel) que des chercheurs de l'Ambiant Intelligence Laboratory de l’université de Singapour proposent d'intégrer dans les architectures Internet. L'objectif est évidemment d'améliorer l’expérience utilisateur, mais également d'ajuster les réseaux et les applications selon des besoins et des ressources, en fonction du terminal utilisé, de l’endroit où il se trouve, du réseau disponible, et surtout des attentes potentielles de l'usager. C'est-à-dire selon le contexte.
Cette conception d'architecture et de fonctionnement repose sur les sciences cognitives, et sur la façon dont les informations sont représentées et traitées par les sujets. Or la pensée humaine est "sensible" au contexte et à son environnement, et prend les bonnes décisions en fonction de ceux-ci. Pour parvenir à ce type d’intelligence, l’architecture idéale doit savoir séparer l’hôte, son adresse, le nom de l’utilisateur final, les données et les périphériques réseau, et les manipuler de manière individuelle. Le module proposé, User-Context Module, a pour but d’intégrer des informations pertinentes de contexte.
Le Module se divise en trois sous-systèmes : le Context Interface, le Context Model, et le Contrôleur. Le premier interagit directement avec l’utilisateur final, son identité, ses préférences, et son environnement, sa localisation... Le deuxième recueille des informations sur le modèle de contexte, données abstraites sur le statut de l’utilisateur, son comportement sur le réseau. Le Contrôleur interagit directement avec les couches réseau et l’infrastructure, pour ajuster automatiquement les protocoles ou les paramètres capables d’optimiser les performances du réseau, et ainsi offrir une meilleure expérience à l’utilisateur.

DIV : Un drone pour les phoques.

Les UAV (unmanned aerial vehicle) plus couramment appelés drones, sont des engins aériens commandés par un pilote ou un équipage de spécialistes aériens depuis une base au sol ou en mer. Leur utilisation tactique a été largement commentée lors des deux guerres du Golfe et aujourd'hui en Afghanistan. Principalement d'usage militaire, tactique ou d'observation, ils servent également depuis quelques années pour des usages civils de surveillance des frontières, du trafic maritime et routier, mais aussi de recherche ou de sauvetage, de veille des feux de forêts et d'observation des espaces écologiques, ou pour des usages plus spécialisés par des professionnels de la pêche en mer, du BTP, de l'architecture ou de l'aménagement de bâtiments ou de chantiers immobiliers, routiers ou ferroviaires... Les usages scientifiques sont encore rares et ils méritent donc d'être signalés.
Les chercheurs de l'Université d'Arizona viennent d'acquérir un drone "ScanEagle" des sociétés Boeing et Insitu pour étudier les espaces inaccessibles de la surface de l'Artique, les cartographier, et faire l'inventaire des animaux épars qui occupent la banquise.
Dérivé du drone SeaScan de Insitu utilisé par les pêcheurs pour repérer les bancs de thon, ScanEagle a été initialement conçu comme drone léger de surveillance militaire. Il a été déployé par l'Armée américaine en Irak dès 2004, puis dans la Marine en 2005 pour des missions de patrouille maritime mais également des missions côtières depuis des navires au large. Il est également aujourd'hui utilisé par les armées australienne et canadienne.
Ce mini UAV monomoteur à hélice peut être équipé de plusieurs types de capteurs, enregistreurs et transmetteurs d'informations visibles ou infrarouges, d'un navigateur GPS et même pour les versions militaires d'un mini radar.
Il est capable d'une autonomie de 20 heures et de 100 km de rayon d'action, télécommandé depuis sa base.
Le programme scientifique est une collaboration du Cooperative Institute for Research in Environmental Sciences de l'Université du Colorado à Boulder, et de la National Oceanic and Atmospheric Administration. Initié en 2009, le programme est coordonné par Elizabeth Weatherhead du CIRES, et concerne à la fois la topographie et la biologie animale. Un premier objectif a été l'étude de quatre espèces de phoques. Le programme s'intéresse notamment à l'impact de la fonte de la banquise et de sa diminution de surface sur les populations animales.
Un exemple réussi de transfert du militaire au civil, au service de la biologie et de l'étude de l'environnement.

02 octobre 2011

BIO : Le nocebo, ou le côté obscur du placebo.

L'effet placebo est un fait admis seulement depuis la fin du siècle dernier. Jusque là, la médecine ne pouvait admettre l'influence d'une substance biochimiquement non active. Le terme vient du latin "je plairai" ; il apparait pour la première fois dans le dictionnaire médical anglais Hooper de 1811 : "médication destinée plus à plaire au patient qu'à être efficace".
L'effet placebo provoque une amélioration de l'état du patient sans pour autant qu'il soit soumis à une substance chimique active. Il peut être direct, c'est-à-dire agir directement sur la maladie ou ses symptômes, ou indirect, c'est-à-dire potentialiser l'action d'une molécule active prise en même temps.
Il est objectivement quantifié par l'écart positif constaté entre le résultat thérapeutique observé lors de l'administration d'un médicament et l'effet thérapeutique prévisible en fonction des données strictes de la pharmacologie. Il est d'autant plus critique qu'il intervient dans les essais en double aveugle, puisque le patient croit qu'il prend un médicament alors qu'il s'agit d'un placébo, ou pire, peut croire qu'il prend un placébo alors qu'il reçoit un traitement actif. Dans ce dernier cas, on parle de l'aspect négatif du placebo, que certain nomment "nocebo".
Si jusqu'ici les chercheurs se sont consacrés principalement à l'étude de l'influence positive du placébo, celle de l'effet nocebo (du latin : "je nuirai") n'est encore que confidentielle. Le terme a été utilisé 150 ans après celui de placébo, en 1961, par le médecin Walter Kennedy. Selon lui, un patient sur quatre en ferait l’objet. Il s’agit en quelque sorte d’un placebo qui a mal tourné, en intoxiquant ou provoquant des effets secondaires  tels que vertiges, maux de tête, diarrhées, allergies, douleurs menstruelles, etc. On a même noté des effets d'accoutumance, avec des patients devenu « accro » à un produit totalement neutre. Plus important encore, la présentation que l'on fait du traitement : prescrire un placebo à des patients sans leur préciser de quoi il s’agit, ni quels effets il peut produire, déclencherait des symptômes dans plus de 80 % des cas. Accompagner la prescription par un discours désobligeant ou menaçant augmenterait ainsi le taux de cholécystokinine, hormone impliquée dans la perception de la douleur.
L’effet nocebo peut prendre des proportions critiques pour la santé. On a montré qu'un placébo provoque l’impuissance chez un tiers des hommes auxquels on a exposé les désagréments possibles sur leur libido d'un traitement pour la prostate. Des patients parkinsoniens traités par électrodes implantées peuvent retrouver des difficultés à bouger et des tremblements dès qu'on leur fait croire que les électrodes ne fonctionnent plus.  Certains habitants voisins d’une antenne-relais se sont plaints de différents symptômes alors que l’antenne n’avait pas encore émis. On a même rapporté la mort d'un patient en état non critique après une erreur d'un prêtre lui ayant administré l'extrême onction par erreur.
L'effet nocebo est donc un effet négatif qui va annuler ou réduire, voire annuler les effets pharmacologiques d’une substance, voire provoquer un trouble attendu de cette substance en sa parfaite absence. Comme l’effet placebo, l'effet nocebo n’est pas lié à la substance, mais à l’attente psychologique du patient, découlant souvent d'ailleurs de l’attente du médecin vis-à-vis du traitement qu’il prescrit.
Des chercheurs britanniques et allemands ont mené une étude sophistiquée sur l'effet nocebo et la douleur, publiée dans Science Translational Medicine (lien). Après avoir fixé des diffuseurs de chaleur sur la jambe de 22 volontaires en bonne santé, ils ont augmenté le rayonnement jusqu'à une plainte douloureuse de 70 sur une échelle de 1 à 100. Ils ont été placés sous perfusion d'une forte dose de rémifentanil (dérivé de la morphine), ce qui a provoqué la diminution de la douleur même chez les sujets non informés.
Puis, les expérimentateurs ont informés leurs patients qu'ils allaient leur injecter l'analgésique, même si celui-ci circulait déjà dans leur organisme. Les participants ont signalé une nouvelle réduction de la douleur — ce qui montre l'effet placebo de l'analgésique.
Enfin, les chercheurs ont encore menti, en disant aux sujets qu'ils allaient cesser le traitement et que leur douleur allait probablement augmenter. Leur niveau de souffrance a quasiment retrouvé celui enregistré avant tout traitement, leurs craintes annulant l'effet d'un médicament, montrant un effet nocebo.

"The Effect of Treatment Expectation on Drug Efficacy: Imaging the Analgesic Benefit of the Opioid Remifentanil", U. Bingel et al., Sci. Transl. Med., 16-02-2011, vol. 3, Issue 70, p. 70ra14.
"Nocebo-induced hyperalgesia during local anesthetic injection", D. Varelmann et al., Anesth. Analg.,  vol. 110, no 3, mars 2010, p. 868-70.
"L'effet placebo. Un voyage à la frontière du corps et de l'esprit", par Ivan O. Godfroid, Charleroi (Belgique) : Socrate Éditions Promarex, 2003.

"Un placebo peut être nocif", revue Science et Vie, Août 2010, page 55.