A l’occasion de la conférence annuelle Computer Human Interaction de Boston, Thomas Beauvisage, chercheur à Orange Labs en France, présentait une étude sur l’usage des ordinateurs dans la vie quotidienne.
Cette étude a consisté à installer un logiciel de traçage dans les ordinateurs de 661 foyers français volontaires et représentatifs pendant 19 mois (entre 2005 et 2006) pour mesurer précisément les usages informatiques quotidiens des membres du foyer. Le logiciel mesurait les logiciels fonctionnant sur l’ordinateur et proposait à chacun de ses allumages et après 30 minutes d’inactivité une fenêtre pop-up pour que l’utilisateur s’identifie afin de connaître qui dans le foyer était en train de l’utiliser. Malgré certaines limites expérimentales, quelques éléments sont intéressants et riches d'enseignements.
La moyenne d'utilisation de l'ordinateur est de 23 jours par mois (3 jours sur 4) et en moyenne un peu plus de 7 heures par jour (moins dune heure sur 3). Mais en fait, la moyenne quotidienne d’utilisation réelle se situe plutôt autour de 2 h 51 (un mpeu plus d'un dixième). La plupart du temps, les ordinateurs sont allumés toute la journée, voir jour et nuit, avec des pics d’activités effectifs entre 9h et 11h et entre 16h et 21h.
L’étude a permis de distinguer plusieurs types de profils selon l’intensité de l’usage de l’ordinateur :
- Ceux dont l’ordinateur est allumé 24h/24 (15 % du panel) considèrent l’ordinateur comme une ressource qui doit tout le temps être accessible. Pourtant, ils ne l’utilisent que 3h30 par jour en moyenne. Mais ce comportement correspond souvent à un usage important du P2P, de logiciels multimédias et de la messagerie instantanée.
- Ceux dont l’ordinateur est toujours disponible (33 %), qu’on allume au premier usage et qu’on ferme le soir, montrent là aussi un fort usage de la messagerie instantanée.
- Ceux dont l’ordinateur est allumé à la demande (30 %) et qui ont tendance à fermer l’ordinateur après de courtes sessions d’usage, utilisent plutôt des applications bureautiques, du web et du mail.
- Ceux qui ont un faible usage (22 %) correspondent à ceux qui ont utilisé leur ordinateur moins de 15 jours par mois et qui ont des usages proches du groupe précédent.
D’une manière surprenante, souligne Thomas Beauvisage, les facteurs sociodémographiques ont un faible rôle dans ces différences d’usages, beaucoup moins en tout cas que les préférences logicielles. Le chercheur constate également qu’il y a une grande variabilité du temps d’usage entre les individus et le foyer. Le temps moyen effectif d’utilisation par individu est de 9 heures par semaine, mais 25 % des 1434 individus qui composaient l’échantillon utilisent l’ordinateur moins d’1h14min par semaine et 25 % des plus actifs l’utilisent plus de 14 heures par semaine. Mais quand on compare l’utilisation entre individus et foyers, on constate que dans un quart des foyers composé de plus de deux personnes, il y a un non-utilisateur de l’ordinateur. Dans les foyers de deux utilisateurs, l’utilisateur le plus actif passe 83 % du temps devant l’ordinateur, et cela ne progresse guère dans les foyers de plus de deux utilisateurs. Plus que de souligner la concurrence à l’accès au sein même des foyers, l’étude remarque qu’il y a un utilisateur principal et que l’utilisateur secondaire a tendance à garder un usage modéré que ce soit parce qu’il a moins d’intérêt dans l’utilisation de l’ordinateur ou parce qu’il délègue certaines tâches à l’utilisateur principal.
A quoi les utilisateurs passent-ils leur temps ? De ce côté là, l’étude apporte peu de surprise par rapport à ce que l’on savait déjà. Sur les 9 heures hedbomadaires passées sur leur ordinateur en moyenne, l’internet compte pour 63 % des usages de l’ordinateur (soit 5h35 minutes) et sur ces 63 %, 71 % (soit 3h57 minutes) est consacré au web. Si on écarte la gestion de l’ordinateur (manipulations de fichiers, temps de transitions entre applications…), ce sont les jeux et la messagerie instantanée qui arrivent ensuite, totalisant chacun 45 minutes d’utilisation par semaine.
En regardant l’usage des différentes applications, l’étude constate que les 5 applications les plus utilisées par les individus représentent 83 % du temps d’usage moyen des ordinateurs. Pour autant, les petits utilisateurs ne se concentrent pas sur certaines applications alors que d’autres, plus ‘évoluées’ (jeux, P2P, multimédias) seraient réservées aux utilisateurs intensifs. Non, les profils d’usages de l’ordinateur semblent plutôt liés aux choix individuels de certaines applications, indépendamment de l’intensité ou de la fréquence de l’utilisation.
L’étude a mis en avant 5 profils d’utilisateurs :
- Les internautes (42 % du panel) utilisent massivement leur ordinateur pour le web, sans pour autant y développer des usages plus experts que d’autres catégories d’utilisateurs (ils n’achètent pas plus en ligne que d’autres).
- Les tchatteurs (30 %) utilisent plus que d’autres la messagerie instantanée (38 % de l’usage de l’ordinateur contre 8 % dans les autres catégories), ainsi que des applications multimédias et des jeux, et ont une utilisation plus intensive des téléphones mobiles et des SMS. 51 % des profils de ce groupe ont moins de 25 ans. 60 % sont des femmes.
- Les joueurs (11 %) utilisent plus massivement le jeu (42 % de leur usage d’ordinateur). 32 % ont moins de 25 ans, mais 61 % du temps total passé à jouer par les membres de cette catégorie correspond à des casual games.
- Les multimédias (14 %) consomment beaucoup de contenus multimédias et de logiciels audio et vidéo, ainsi que des logiciels P2P, des outils de gravage de données et de sécurité. Les utilisateurs de ce groupe sont plutôt des hommes (65 %) qui vivent souvent seuls (22 %).
- Les sérieux (18 %) préfèrent les applications bureautiques (20 % du temps passé) et le mail (16 %) et ont plutôt un usage professionnel des ordinateurs.
Thomas Beauvisage veut voir plusieurs applications concrètes à ce travail :
- Améliorer la conception des systèmes d’exploitation : réduire le temps de lancement de l’ordinateur est capital pour les utilisateurs qui ont un faible usage ; le préchargement des 5 applications les plus utilisées selon un système de détection automatique semblerait aussi pouvoir améliorer l’efficience de nos machines…
- Améliorer la conception des applications et des services : chaque type d’individu semble se constituer son propre territoire d’applications, ce qui signifie qu’il faut certainement mieux réfléchir aux offres de services selon ce type de comportement et qu’il vaut mieux proposer des add-on à des applications existantes, plutôt que de chercher à développer de nouveaux services indépendants.
- Vers les web services : le web apparaît comme l’application la plus partagée des usagers de l’ordinateur et elle est au centre de l’intérêt de 4 usagers sur 10 ! Assurément, les applications web ont certainement plus d’avenir que les logiciels, prédit Thomas Beauvisage. L’évolution du web depuis 2006 semble lui donner chaque jour un peu plus raison.
(Via Internet Actu.)
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